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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/26

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libre le long du bras de Mlle Raton, et ce bras dodu, potelé, blanc, frais au toucher, était nu jusqu’au coude. M. Poitou prenait parfois la taille de Mlle Raton pour lui éviter la rencontre d’un commis affairé, d’une tête à l’évent, d’un carrosse, d’une brouette de vinaigrier, d’une marchande d’huîtres à l’écaille.

— Balais ! Balais ! — À la flotte, à la flotte, mes beaux rubans ! — La paille d’avoine, la paille ! — Mottes à brûler, Mesdames, belles mottes !… criaient autour d’eux les gagne-petit.

Et Paris bourdonnait, ronflait et glapissait de tous ses métiers.

— Il ne faut pas tant s’émouvoir, Mademoiselle Raton, disait Poitou. Je voudrais bien que quelqu’un des nôtres vous manquât, Jarni ! Mais ce sont de braves gens comme vous et moi, malgré ce qui est écrit dans la lettre, soit que nous sommes des fripons, des coureurs, des ivrognes et des paresseux. Si cela était, on ne nous garderait pas. Ce sont de ces noms que l’on nous donne quand on a de l’humeur à passer, que l’on est repic et capot à des cartes qu’ils appellent le pharaon et que nous appelons le piquet, ou bien quand on a égaré ceci ou cela : Où as-tu mis mon épée, maroufle ?… Qu’est devenu le plumet que j’avais hier, coquin ?… Tu l’auras revendu pour boire ?… Va me chercher ma canne, que