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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/25

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Je ne lis que la lettre moulée, et un peu les livres quand ils sont en gros.

Elle ajouta qu’elle avait oublié le nom de la rue à force de se le répéter. Elle aurait pu montrer sa lettre à ceux qui l’entouraient, lui posaient des questions et lui offraient leurs bons offices. Mais elle s’était tenue sur la réserve. D’ailleurs, on l’avait confiée au roulier. Celui-ci l’avait oubliée pour ses chevaux et ses valets. Il leur parlait si rudement qu’elle avait eu peur de lui rappeler sa mission. Au surplus, on l’avait assurée que Mme la Duchesse ne manquerait pas de la faire prendre. Au cas contraire elle n’aurait eu qu’à s’informer, Mme la Duchesse et M. le Duc étant connus de tous. Elle se serait résolue à montrer sa lettre au premier passant. Enfin, si elle avait pleuré, ç’avait été de se sentir seule au milieu de ces gens qui se retrouvaient et s’embrassaient, ce qui lui rappelait sa bonne nourrice qu’elle avait peut-être quittée pour toujours. Et puis encore, elle appréhendait de servir chez les Ducs, n’ayant aidé que sa nourrice à balayer, à laver, à blanchir, à repasser et repriser. Les autres allaient sans doute se moquer d’une villageoise, lui faire des niches ou la laisser de côté. Elle s’ennuierait.

En marchant, elle se rapprochait de M. Poitou. Quant à M. Poitou, il glissait sa main heureusement