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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/261

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Conspiration de Cellamare ?… Ciel ! que le monde est plaisant : l’on y vit dans la crainte de la délation, chacun, parlant de son voisin, dit tout bas : « Il en est. » Mais, en vérité, pas un qui n’en soit, depuis le décrotteur jusques au courtisan, en passant par le tirelaine !

— Cependant, l’Abbé, tu ne vas pas soutenir que celui-ci en soit.

— Il n’en est pas pour l’instant, mais, à coup sûr, il en sera plus tard, quand il aura dissipé sa fortune et pratiqué pendant cinq lustres le régime des prisons, comme il ne peut manquer d’advenir.

« Oui-da, reprit l’abbé, le siècle est une association policière où les Princes ne sont que figures sans puissance, sans autorité ni assiette personnelles, au point qu’on leur pourrait substituer les emblèmes gigantesques d’un Œil et d’une Oreille. Pourtant, tout est bien ainsi : je dis qu’il faut que l’un surveille l’autre dans ses moindres propos et le dénonce sans répit, car les hommes sont si méchants, si pervers que la Main de Dieu qui gouverne les astres, soulève, apaise et contient dans ses bornes le docile Océan, mesure l’exacte précession des équinoxes et le juste retour des saisons, est trop vaste et magnanime pour une chétive république de guêpes qu’irritent les lois de l’Harmonie.

— Il existe aussi des mouches noires, dit la Mère,