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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/303

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— Ma chère enfant, dit-elle, en regardant l’habit et le bonnet de Raton qui décelaient assez son état, j’ai pleine confiance en Mme la Duchesse. Elle projette, sans doute, d’être votre marraine… Mais, d’abord, asseyons-nous… Vous n’ignorez pas, continua-t-elle, ayant poussé un siège près de la table où elle s’accouda en laissant pendre une main translucide et veinée de bleu pâle, vous n’ignorez pas que notre Ordre exige une dot…

Ce disant, elle s’adressait plutôt à Mme la Duchesse, qu’elle croyait dans le pieux dessein de répondre pour sa servante.

— Madame, dit Raton, qui tira de sa poche le sac de lustrine, je possède cinq mille livres. Je les dois à l’assistance d’une bienfaitrice qui désire rester ignorée.

— Cinq mille livres ! fit la Prieure en baissant les yeux sur le rosaire qu’elle se mit à lisser d’une main distraite, cinq mille livres, nous sommes un peu loin de compte !…

— Oh ! dit Raton, j’ai encore quelque chose là, mais je ne sais au juste combien ça fait…

Et Raton se leva pour aveindre la tirelire de sa poche de jupon.

Mme la Duchesse eut un geste de réprobation qui tendait à rabattre la robe que sa protégée retroussait sans vergogne.