Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/373

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Les trois figures du Christ, de la Vierge et de Marie-Madeleine s’effacèrent. Il ne resta plus de la montagne que son faîte en forme de plateau, mais coloré d’une façon véridique et doué d’un relief saisissant. Et ce faîte, chargé de nuages obscurs, dépassa son cadre. Il remplit presque tout le sanctuaire. Raton distinguait en détail les mottes avec leurs herbes et leurs fleurs sauvages agitées par le vent, et celui de rares buissons de ronces où se tapirent des belettes, des couleuvres, des rats et des blaireaux effrayés par quelque événement d’importance. Puis parurent des cavaliers chargés d’armures de fer et de cuir. Raton commença de voir progressivement leurs enseignes, leurs lances, leurs casques, la moitié de leurs torses et la tête de leurs chevaux qui rongeaient des mors écumeux. Une multitude bariolée les suivait. Ils se retournaient au bord du plateau pour regarder ceux qui gravissaient la pente difficile ; la plupart faisaient le geste d’exciter, de frapper, de pousser, montrant des faces horribles aux cheveux collés par la sueur. Enfin, parut le sommet de la Croix, vacillant de droite et de gauche, en avant et en arrière. Raton, jusque-là assise, se jeta à genoux, les bras étendus.

Mère Marie-Thérèse de Saint-Augustin fit signe à Sophie de Sainte-Anne d’agiter sa matraque, afin de rappeler Raton au maintien qu’elle devait avoir et à la