Aller au contenu

Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/378

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Mère, chuchota timidement la vieille Sophie de Sainte-Anne empressée à la suite de la Prieure et n’osant lui retenir le bras, Mère, il vaudrait mieux envoyer chercher M. le Chapelain… Il ne nous appartient pas de…

— Laissez, laissez, Sainte-Anne !… dit Marie-Thérèse, soudainement embarrassée et s’arrêtant, toutefois, au milieu de son adjuration.

Cependant, Raton, jusque-là immobile, joignit les mains dans un nouveau transport. Au lieu d’exprimer la terreur, ses yeux se noyèrent de béatitude ; des larmes de félicité recommencèrent d’en couler avec abondance. Des soupirs, des mots inarticulés sortirent de sa bouche ; ce ne fut bientôt plus qu’un murmure confus et lointain dont on ne savait distinguer s’il émanait d’elle ou d’un être invisible. Puis, son corps vacillant devint froid et rigide comme un cadavre, le souffle expira sur ses lèvres. L’on aurait pu croire qu’elle fût morte à genoux sans l’activité que ses yeux avaient conservée, et sans la métamorphose de son visage, d’une beauté céleste, où se peignaient à la fois l’admiration, la joie et la douleur. C’est qu’elle voyait son Bien-Aimé lui apparaître au-dessus du tabernacle. Il lui montrait son cœur embrasé : pareille à la bienheureuse Baptistine Varani, elle y lisait son nom de Raton en belles majuscules d’or.

Marie-Thérèse de Saint-Augustin, que la Sous-