Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/382

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l’Égyptienne, que vous comptez parmi vos patronnes ? Ah, Madame ! vous n’êtes pas exempte des préjugés du siècle, et le hautain exemple de Louise de la Miséricorde vous incline à mépriser une fille de rien, n’est-ce pas ? Courtisane de bonne maison, elle vous eût fait honneur ; prostituée de mauvais lieu, elle vous donne la nausée. Et moi, je vous dis que, malgré les mérites de l’Illustre Pénitente — ils sont grands et je m’incline, — les éclatantes vertus de cette enfant méprisée la rapprocheront davantage de Notre-Seigneur. Puissé-je, Madame, la contempler dans sa gloire, au premier rang des élus. C’est aussi la grâce que je vous souhaite.

— Monsieur, avait répliqué Marie-Thérèse de Saint-Augustin, je confesse mon erreur. En effet, j’ai cédé à un mouvement impulsif, mais j’aurai l’excuse d’avoir tremblé pour mon troupeau. Car vous n’ignorez pas, Monsieur, combien ces tentations sont contagieuses. Je me dispenserai d’exemples célèbres. Au surplus, mon geste, si répréhensible, parut avoir calmé sœur Deodata… Je dis parut, n’étant pas comme vous, Monsieur, encore affermie dans cette idée que mon intervention ait ramené la grâce divine… Vous rappellerai-je cette franciscaine de Cordoue, Madeleine de la Croix, élue abbesse en 1533 ? Ayant fait un pacte avec le diable, elle simula si bien la sainteté que l’auguste épouse de Charles-Quint