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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/52

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l’avait traité de singe de Nicolet, au grand amusement de l’assemblée. Après un timide salut, Raton s’était laissée conduire, à travers mille détours, dans l’appartement de Mme la Duchesse, dont la garde-robe, qu’elle devait occuper, s’ouvrait sur un escalier de dégagement. Là, elle retrouva sa malle devant le lit et ses yeux se remplirent de larmes : elle lui rappelait sa nourrice et sa maison.

— Bonne nuit, Mademoiselle Raton, avait dit sa compagne. Il vous reste d’attendre Mme la Dussèche. Vous allumerez deux flambeaux chez elle en passant par cette porte, que vous laisserez ouverte pour l’entendre venir, et puis vous préparerez son lit. Vous attendrez p’têt’ longtemps. Dame ! ceusses-là qui n’ont rien à faire ne sont pas pressés de piausser… Mais on aura toujours la ressource de penser à son amoureux.

L’amoureux à part, Raton avait suivi toutes ces indications. Le lit de Mme la Duchesse, au-dessus duquel folâtraient des Amours, sa chambre, son boudoir tout reluisant de lustres et de dorures, plongèrent Raton dans l’émerveillement et la crainte. En se retournant, elle pensa se trouver mal : dans la pénombre, un homme, dont elle ne distinguait que la moitié du corps, la regardait en souriant. Elle se rendit enfin compte que ce n’était qu’une toile peinte, sans doute le portrait de M. le Duc.