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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/75

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perspective de Philippe de Champagne l’idée la plus avantageuse, mais Raton n’en avait cure. Ici et là, elle remarqua dans leurs cadres Marie l’Égyptienne méditant sur un crâne, et Sainte Thérèse d’Avila livrant son cœur à la pique enflammée d’un ange. Un tableau représentant Marie-Madeleine, ouvrage de M. Le Brun, retint davantage son attention. Il était au-dessus de l’autel, dans la chapelle qui semblait être la loge réservée de Mme la Duchesse, de sorte que Raton put le détailler aisément. La Pécheresse, parée de ses riches vêtements de courtisane, repoussait du pied un coffret renversé d’où s’échappaient des colliers de perles et des bagues. Elle tordait d’une main ses beaux cheveux blonds devant un miroir, comme si l’amour du Dieu jaloux l’eût surprise dans les soins de sa coquetterie. Des larmes soudaines de repentir, d’un orient plus précieux que celui des perles, roulaient sur son visage où se lisaient encore la surprise et la crainte. Un lambeau de nuage orageux pénétrait par la fenêtre, semblable aux passions qui offusquent nos âmes et nous ravagent. Image de la vanité du monde, un palais se voyait au loin, dressant sa tour orgueilleuse au bord de la mer incertaine.

— C’est La Vallière, dit tout bas Mme la Duchesse en se penchant vers Raton, La Vallière qui se nommait ici Sœur Louise de la Miséricorde…