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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/85

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genou qui ne se dérobait pas, je confesse une brusquerie qui ne prouve après tout que l’excès de mes feux. Depuis ton arrivée, je cherche l’occasion de te faire signe ; elle m’est toujours refusée. Aujourd’hui, j’avais résolu de te surprendre. Je t’ai vue si rêveuse, un livre sur les genoux, que j’ai pensé que tu songeais à l’amour. Il est naturel que la lecture des romans éveille l’esprit et les sens chez une jolie fille de ton âge…

La main de M. le Duc quitta le genou pour la jambe, remonta vers la cuisse et fit une navette qui gagnait chaque fois un bon pouce dans le sens de la hauteur.

— Je ne m’étais pas trompé, aimable Raton, poursuivit M. le Duc, puisque l’aveu flatteur qui s’échappa de tes lèvres me força de croire que j’occupais ta pensée… Allons ! parle à ton maître, prouve-lui ta tendresse, dis-lui qu’il ne rencontrera plus de résistance…

La main de M. le Duc n’en rencontrait point. Elle en était à se rendre compte de l’intégrité de sa conquête.

— Monsieur le Duc, dit Raton sans démasquer son visage, je suis une honnête fille. Mais, comme je lui porte du respect, je suis l’humble servante de Monsieur le Duc. Qu’il veuille bien me donner cent pistoles pour le service qu’il attend de moi, et dix pistoles pour le renouvellement, chaque fois qu’il lui en prendra l’envie.

— Morbleu ! s’écria M. le Duc, en retirant vivement