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Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/29

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SOUVENIRS

l’ordre du départ des postillons ; ce calendrier funeste les aidait à compter leurs tristes jours. Ainsi des mourans nous conduisaient à travers cette campagne charmante ; l’horizon était éblouissant de lumière, les buissons couverts d’oiseaux, et nous roulions souvent sur la voie antique : on la quitte avec peine ; car la route papale n’est qu’un bourbier. Personne n’a de droits mieux acquis que le Pape à répéter avec Jésus-Christ : Mon royaume n’est pas de ce monde. À chaque pas que l’on fait dans les états du Saint-Père, on ne rencontre que misère et que souffrance. Je n’ai vu ici d’action, d’agitation, d’activité, que dans la chaire évangélique. Les prédicateurs se démènent : c’est à la sueur de leur front qu’ils fécondent la vigne du Seigneur, tandis que l’agriculteur dort dans la plus profonde paresse.

Voilà le dôme de Saint-Pierre, voilà Rome ; et par-tout les traces de la fièvre : on la trouve en garde avancée hors des portes, marquant au hasard[1] les maisons qu’elle désole. Ce fléau des-

  1. Telle maison est mortelle à habiter, tandis que la maison voisine est fort saine.