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Page:Fournier - Mon encrier (recueil posthume d'études et d'articles choisis dont deux inédits), Tome II, 1922.djvu/72

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MON ENCRIER

Ce Tortillard m’appelle volontiers l’homme de « toutes les réactions ». Et, en effet, j’ai passé mon temps à réagir d’abord contre le despotisme impérial, puis contre les opportunistes, contre les panamistes et contre les radicaux de l’assiette au beurre. Il est impossible d’avoir réagi aussi obstinément que je l’ai fait. Cette manie de réaction m’a même valu seize ans de prison, de déportation et d’exil, tandis que les Brousse et les Rozier ont fait produire à leur socialisme plus ou moins unifié une bonne rente de quinze mille francs par an. Ces gens-là, je le reconnais, ne sont pas des réactionnaires. Ce sont des actionnaires. »

Croiriez-vous, après cela, qu’il ait près de quatre-vingts ans ? Je l’aurais cru encore moins que vous, après l’avoir vu, la semaine dernière, s’il ne me l’avait lui-même assuré.

⁂ C’est un grand vieillard, très droit et très solide encore.

Il me reçut en veston d’intérieur, dans son cabinet de travail, avec la plus grande simplicité. Il pouvait être, quand j’entrai là, comme onze heures du matin ; j’en sortis à une heure et demie, après l’une des conversations les plus intéressantes dont je me souvienne.

Aux premières questions qu’il me posa, je vis tout de suite qu’il n’était guère renseigné sur notre pays. Tout ce qu’il connaît du Canada, de