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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/169

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DE JEAN FROISSART.

Ensi Paours me tient en grant soussi.
Mes savés vous de quoi je me soussi
De ce quon dist, oublyé ne l’ai mie,
Que coars homs n’aura jà belle amie.
Mès sans faille, dame, ma coardise
Ne me vient point de mal ne de faintise,
Fors que de très parfette loyauté
Que bonne amour a en mon coer enté.
Car se j’avoie en moi un hardement
Qui me fesist mouvoir trop radement,
Il me poroit bien faire tel contraire
Qu’il me feroit vostre grasce retraire ;
Et si seroit presumptions très grande ;
Ce n’est pas ce qu’Attemprance demande.
Pour ce vodrai le droit moyen tenir,
Afin que puisse à vo grasce avenir,
Car elle m’est grandement necessaire.
Si m’ai plus chier souffrir et à point taire
Que fols cuidiers me face faire ou dire
Chose qui soit presumée à mesdire ;
Car lors seroie à tousjours-mès perdus,
Se vous, dame, qui portés les vertus
De moi garir, me deboutiés arrière,
Et refusiés par ma fole manière.
Et d’autre part vos escondis tant doubte
Que ce me met en une trop grant doubte ;
Car s’escondis diversement estoie
Avec tout ce que Paours me chastoie
Ce me seroit un si très garant contraire,
Que plus vers vous ne m’oseroie traire ;