Aller au contenu

Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
DE JEAN FROISSART.

Lors li doit si s’espérance doubler
Que nuls ne puist son corage tourbler.
Ensi dont font, com vous povés entendre,
En coer d’amant espérance descendre ;
Car se le vrai amant ne concevoit
En sa pensée, et aussi s’il n’avoit
Espérance et imagination
De parvenir à la conclusion
À son entente et à ce qu’il désire,
Les heures a-moureuses, au voir dire,
Ne poroïent sonner souffisamment,
Ensi qu’il apertient, et que briefment
Il vous sera a déclairié ci après ;
Car croire doit amans, par mos exprès,
Que tout son fait assés petit vaudroit.
Puisqu’espérance au besoing li faudroit,
Quand je regarc, ma dame, de quel part
Ce doulc regart se moet et se depart
Qui ne me lait, ne pour gain ne pour perte,
Amour, qui est la merci soie à perte,
Me monstre nuit et jour apertement
Que ce penser prent son departement
D’un vrai desir amoureus qu’il m’envoie
Plusieurs assaus. Dont, s’avoec moi n’avoie
Un douc penser qui m’ayde et conforte
Moult me seroit ma penitance forte ;
Car ce desir qui asprement s’avance
A dessus moi grant part et grant puissance,
Et me convient que là où il me tire,
Au mieuls que puis comparer mon martire.