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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/185

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DE JEAN FROISSART.

Que de vous aie aucun aliegement,
Car mon coer est vostre tout liegement.
Et si souffrés, ma douce dame gaie,
Que doulc penser, qui nuit et jour me paie,
Et ramentoit esperance à toute heure,
Sa grasce en voir et son confort saveure ;
Car s’autrement se portoit ma querelle,
Trop me seroit m’aventure rebelle
Que j’ai tenu et tienc à éureuse,
Depuis qu’empris ai la prise amoureuse
De vous servir, obéir et cremir.
Quant à ce pense, assés me fait fremir
Et esbahir, car je ne sçai retraire
À quele fin ceste oeuvre vodra traire.
Et non-pour-quant j’ai bien la cognissance
Que vous avés sus moi tant de puissance
Qu’il me convient vo doulc plaisir attendre ;
Et s’un petit voliés ma vie entendre,
Comment je l’ai maintenu longe espasse,
Vous me feriés grant aumosne et grant grasce,
C’est que desirs nuit et jour m’appareille
Maint grant assault ; or n’ai qui me conseille.
Dont c’est pour moi que moult dure chose,
Car de mon fait parler je ne vous ose,
Ne vous monstrer comment je sui tout dis ;
Car je doubte si fort vos escondis,
Et les perils qui sont de Maleboucbe,
Que trop m’esmai que je ne vous courouce ;
Et ce ne se poroit faire à nul foer
Que je vosisise errer contre mon coer