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Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/310

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POÉSIES

Et ensi com illoec estoie
Et qu’au parler je m’esbatoie,
Ma dame d’aventure y vint.
Contre li lever me convint.
Quant je le vi je fui tous pris.
Toutes fois assés bien compris
Qu’un petit coulour changea-elle.
Et là estoit la demoiselle
Dont je m’ai à loer moult fort,
Qui nous fist séoir par accort
Et nous dist, encor nous estant ;
« Par foi, vous estes tout d’un grant ;
» Ce seroit une belle paire,
» Et Diex doinst qu’amour vous apaire. »
Lors nous commença à galer ;
Et je cuidai trop bien parler
Et li remonstrer mon desir
Où s’amour me faisoit jesir.
J’en avoie bien temps et lieu ;
Mès, par la foi que je doi Dieu !
Je fui plus souspris en peu d’eure
Que tel que pour mort on court seure.
En parlant ma dame regarde.
Mon coeur dist : « Parle, qui te tarde ? »
— « De quoi ne scai et aussi n’ose. »
Dient mi oeil, « c’est fière chose !
» Tu le vois et n’as hardement
» De li monstrer ton sentement. »
Un grant temps euisse esté là
Sans parler, mès elle parla,