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Page:Gérard - La chasse au lion, 1864.djvu/196

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Aussi le poignard n’a jamais été, dans mon esprit, une arme de salut.

Mais voilà ce que me disais et ce que je me dis encore aujourd’hui : Dans le cas où une ou deux balles ne tueraient pas le lion (chose très-possible), quand il bondira sur moi, si je résiste au choc, je ferai en sorte de lui faire avaler mon fusil jusqu’à la crosse ; puis, si ses griffes puissantes ne m’ont ni terrassé, ni harponné, je jouerai du poignard dans les yeux ou dans la région du cœur, suivant ma liberté de manœuvre et l’état de ses membres.

Si je tombe au choc de l’attaque, ce qui est plus que probable, pourvu que j’aie mes deux mains libres, la gauche cherchera le cœur et la droite frappera.

Si, le lendemain, on ne trouve pas deux cadavres entrelacés, le mien n’aura pas quitté le champ de bataille et celui du lion ne sera pas loin ; le poignard dira le reste.

Je venais de tirer mon poignard du fourreau et de le planter dans la terre, à portée de la main, quand les yeux du lion commencèrent à descendre vers le ruisseau.

Je fis mentalement mes adieux et la promesse de bien mourir à ceux qui me sont chers, et, lorsque mon doigt chercha doucement la détente, j’étais moins ému que le lion qui allait se mettre à l’eau.