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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/110

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sujet de ses méditations était toujours la grandeur éclipsée de son antique et puissante famille. Profondément indifférent aux querelles politiques des blancs, s’il avait accueilli avec enthousiasme la nouvelle de l’insurrection d’Hidalgo, ce n’était que pour en profiter personnellement et essayer, avec l’or dont il rêvait si follement la découverte, de faire revivre en sa personne et le titre de cacique et la domination qu’avaient exercée ses ancêtres. Les croyances païennes dans lesquelles il avait été nourri, les solitudes dans lesquelles il avait constamment vécu en exerçant son métier, la pratique et la vue de l’immense Océan, dont il avait exploré les profondeurs quand il était plongeur, avaient contribué à donner à un caractère déjà bizarre une exaltation superstitieuse qui touchait à la manie.

Le visionnaire Indien avait fini par prendre un tel ascendant sur le nègre Clara, que le don Quichotte zapotèque, différant en cela du gentilhomme manchego, eût fait aussi facilement prendre à son noir écuyer des moulins à vent pour des géants, qu’un capitaine des dragons de la reine pour la Sirène aux cheveux tordus.

C’est au sommet du cerro de la Mesa, ou de la Table, que nous retrouvons les deux aventuriers, une heure environ après le départ de don Rafael Tres-Villas.

Ils achevaient de transporter sans trop de peine la légère piroque de Costal sur la plate-forme de la colline, et de la poser, la quille en haut, le long des parois de la hutte dont nous venons de parler.

« Ouf ! dit le noir en s’asseyant sur l’embarcation, je crois que nous avons bien gagné un instant de repos. Qu’en pensez-vous, Costal ?

— N’avez-vous pas longtemps parcouru la province de Valladolid ? demanda l’Indien sans faire de réponse à la question oiseuse du nègre.

— Sans doute, et celle d’Acapulco aussi, et je les connais toutes deux et bien d’autres, depuis le moindre sen-