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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/218

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nombre, tout l’avantage eût été de leur côté ; car, avant que la barque que montait Cornelio eût touché la barque contraire, trois ennemis avaient été, à vingt pas, enlacés et brusquement précipités dans la mer.

De part et d’autre, chaque homme, étreignant son ennemi, ne combattait plus qu’à l’arme blanche, qui faisait une silencieuse et terrible besogne. Tout à coup, des cris partis de la foule qui garnissait le sommet du fort, auxquels répondirent les cris des soldats de Morelos réunis sur la plage, annoncèrent un incident nouveau. La fureur au même instant fit place à l’étonnement ; comme par enchantement, le combat fut suspendu, les barques se décrochèrent les unes des autres et s’éloignèrent. C’était une trêve tacite. Haletants de fatigue, les combattants se reposèrent, et, autant que le permettait un reste de la clarté du jour, purent reconnaître le sujet des cris qui les avaient séparés.

Embossé sous les murailles de la forteresse, le brick espagnol, ayant mis en panne, hissait de son bord le dernier sac de farine dont il venait d’approvisionner les assiégés. Pendant que les insurgés versaient inutilement leur sang, et que leurs ennemis du moins combattaient pour se procurer les moyens de pourvoir à leur nourriture, le San-Carlos avait tranquillement opéré son déchargement, et les Mexicains eurent le désappointement de le voir s’éloigner à toutes voiles et bientôt disparaître au milieu de la brume du soir.

Cependant des six barques qui composaient la flottille, une seule n’avait pas cessé le combat : c’était la yole amirale. Cette embarcation portait Galeana et Costal, compagnons de Lantejas, qui lui étaient chers à plus d’un titre ; l’Indien surtout, son sauveur d’habitude. Légèrement blessé à la tête, don Cornelio ne pensait qu’à sa blessure, et ses regards suivaient avec anxiété la barque du mariscal.

L’obscurité n’était pas encore assez épaisse pour l’em-