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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/324

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La lune, couchée déjà depuis quelque temps, n’éclairait plus le groupe de bandits réunis dans la clairière ; leurs vêtements usés, souillés dans les bivouacs en plein champ, leur accoutrement moitié militaire, moitié campagnard, ainsi que leurs figures sinistres, présentaient à la lueur du crépuscule un aspect à la fois effrayant et pittoresque.

Tandis qu’autour d’eux dix chevaux essayaient de tromper leur faim en déchirant les feuilles des buissons contre lesquels retentissait avec un bruit de ferraille le mors qui les empêchait de broyer leur maigre pâture, les huit cavaliers, le cartouchier à la ceinture, la carabine en travers sur les genoux et la dague dans la jarretière de la botte, écoutaient les discours de Pépé Lobos.

« Suarez et Pacheco ne reviendront jamais, disait-il ; il est évident que ce colonel de Belzébuth les aura poignardés ou écrasés sans bruit, comme le pauvre Panchito Jolas, et, quoique nous ayons battu le bois toute la nuit sans rien trouver…

— Nous l’avons battu avec acharnement, interrompit l’un des deux insurgés qui avaient une si grande peur de rencontrer le colonel.

— Nous en avons fait tous autant, parbleu ! reprit Pépé Lobos ; demandez plutôt à mon compagnon ; et cependant, bien qu’il ait échappé à nos actives recherches, l’absence de deux d’entre nous prouve évidemment que l’enragé colonel n’a pas quitté la partie du bois où il s’est caché. Dès que le jour va venir, nous irons relever les traces de son cheval et nous saurons juste l’endroit où il a quitté le sentier. N’est-ce pas votre avis à tous ? »

L’assentiment général répondit à la question de Pépé Lobos. « Maintenant, continua-t-il, la vengeance avant tout, et au diable la prime de cinq cents piastres à qui amènera le colonel vivant ; nous l’apporterons mort, tant pis !