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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/323

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que leur inspirait le formidable colonel, que, le masque sous lequel ils cherchaient à se tromper l’un l’autre une fois tombé, ils convinrent, sans fausse honte, de regagner prudemment la clairière désignée pour le rendez-vous, où ils ne couraient pas le risque de trouver celui qu’ils cherchaient.

Les quatre autres continuèrent leur poursuite avec tant de mollesse, néanmoins, par suite d’une appréhension bien justifiée par le courage et la vigueur athlétique de don Rafael, que trois ou quatre heures après, sur dix cavaliers, huit se trouvaient dans la clairière, où nous les avons signalés dans le précédent chapitre, sans avoir été plus heureux les uns que les autres.

Quant aux deux autres qui manquaient à la réunion, la raison de leur absence était toute simple.

Lorsque Suarez s’était mis en devoir de gagner seul la récompense promise, il avait judicieusement pensé que, puisque son compagnon, tout garçon qu’il était, prenait tant de souci de son existence, lui, en sa qualité de père de famille, devait être plus soigneux encore de la sienne propre.

Heureux d’avoir fait preuve de courage sans qu’il lui en coutât rien, Suarez s’était couché à cent pas plus loin, pour penser tranquillement à sa femme, dont il se félicitait de n’avoir pas à supporter l’humeur aigre, ce soir-là, sur son lit de mousse.

Il se promettait d’aller plus tard éveiller son compagnon en lui reprochant sa couardise.

Malheureusement il avait compté sans un hôte qui vint le visiter malgré lui, le sommeil, sommeil aussi profond que celui de son camarade. Tous deux dormaient donc à jambe tendue, selon l’expression espagnole, tandis que les huit autres, après avoir attendu vainement leur venue, commençaient une délibération que les événements devaient rendre, cette fois, plus sérieuse.