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Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/40

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haute voix : « Ainsi vous, seigneur Lantejas, vous craindriez de vous enrôler dans les rangs des insurgés, pour ne pas porter ces ornements diaboliques ?

— Dieu m’en préserve ! s’écria l’étudiant ; n’est-ce pas là un article de foi ? et qui, d’ailleurs, doit mieux se connaître en ces sortes de choses qu’un respectable évêque comme Mgr de Oajaca ? Du reste, s’empressa-t-il de reprendre à l’aspect de l’éclair de colère qui brilla dans l’œil de son compagnon de route, je suis d’un caractère tout pacifique, prêt à entrer dans les saints ordres, et, quelque parti que j’embrasse, ce sera par la prière seulement que j’essayerai de le faire triompher. L’Église a horreur du sang. »

Tandis que l’étudiant parlait ainsi, l’officier jetait sur lui un regard qui semblait exprimer peu de regrets de ne pouvoir enrôler dans celui des deux partis qui avait gagné ses secrètes sympathies un maigre et chétif champion comme ce jeune homme.

« Est-ce pour passer votre thèse que vous vous rendez à Oajaca ? demanda le dragon.

— Non pas, répondit Lantejas ; si je vais à l’hacienda de San Salvador, c’est pour obéir à la volonté paternelle. Ce riche domaine appartient à un de mes oncles, un frère de monsieur mon père, qui m’envoie vers lui pour rappeler à son souvenir qu’il est veuf, riche et sans enfants, et qu’il a une demi-douzaine de neveux à pourvoir ? Qu’y faire ? Mon honoré père a la faiblesse d’être plus attaché aux biens de ce monde qu’il ne conviendrait peut-être, et j’ai dû me résigner à faire deux cents lieues pour aller sonder les dispositions de l’oncle en question à notre égard.

— Ainsi que la valeur de son domaine, sans doute ?

— Oh ! sur ce point, nous savons parfaitement à quoi nous en tenir, bien que nous n’y soyons jamais allés ni les uns ni les autres, répondit le jeune étudiant avec une franchise qui faisait plus d’honneur à son cœur qu’à