Aller au contenu

Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’était rejeté du côté de Marianita, qui avait été fière de l’accepter. Pourquoi maintenant Gertrudis avait-elle ainsi fait exception à la règle générale ? La suite de ce récit le dira.

Disons, en attendant, que c’était en vue de l’arrivée de deux hôtes, attendus dans le courant de la soirée, que ces préparatifs de toilette avaient lieu à cette heure. De ces deux hôtes, l’un était le fiancé espagnol, le second était le capitaine des dragons de la reine, don Rafael Tres-Villas. Le premier n’avait à franchir à cheval que deux lieues à peine, et d’un moment à l’autre il pouvait arriver ; l’autre achevait d’en parcourir plus de deux cents, et quoiqu’il eût positivement annoncé sa venue pour ce jour-là, il était raisonnable de supposer que, sur tant de journées de route, un incident quelconque avait déjoué ses calculs et retardé son arrivée d’un jour. Était-ce par ce motif que Gertrudis n’avait pas commencé sa toilette quand Marianita terminait la sienne ? Don Rafael était-il le seul homme aux yeux duquel Gertrudis voulût paraître belle ? On le dira tout à l’heure aussi.

Parmi les soins quotidiens donnés par les créoles à leur abondante chevelure, un des principaux est d’en éparpiller sur leurs épaules les tresses dénattées, afin que l’air vivifiant puisse circuler parmi cette gerbe épaisse trop longtemps captivée par le peigne. Quand la femme chargée de cette tâché de chaque jour l’eut accomplie, elle sortit de la chambre et les deux sœurs restèrent seules.

Il est certains sujets de conversation, que les jeunes filles de tout pays n’aiment à traiter qu’entre elles et dans le sanctuaire intérieur.

À peine la suivante fut-elle partie, que Marianita, qui achevait de glisser entre ses tresses noires et la conque d’écaille de son peigne des fleurs de grenadier d’un pourpre éclatant, s’élança vers la fenêtre.