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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/111

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chercha longtemps et inutilement. Dans tous les endroits que la lune éclairait, une bizarre hallucination lui montrait la robe blanche de la jeune fille qu’il venait de quitter. Bientôt, soit qu’il eût perdu sa route, soit qu’une puissance l’entraînât, le moine se retrouva près de l’endroit où reposait la compagne, toujours évanouie, de l’étranger. Seulement, celui-ci n’était plus là. Une tentation terrible menaçait la vertu du révérend. Il y avait là, devant lui, une femme jeune et belle, dont la chevelure noire flottait déroulée sur de blanches épaules. Jamais la lune n’avait eu de plus magiques reflets, jamais les bois n’avaient exhalé une senteur plus enivrante. Fray Epigmenio, épouvanté, appela l’étranger de toutes ses forces mais l’écho seul lui répondit. »

Un éclair éblouissant vint interrompre, à cet endroit, le récit du moine, et nous annoncer que l’orage redoublait. Cette nouvelle interruption devait se prolonger bien au-delà de nos prévisions. Une eau fangeuse gagnait déjà nos étriers. Nos chevaux, immobiles depuis longtemps, venaient enfin de se retourner pour présenter leurs poitrails au fil de l’eau, dont l’impétuosité croissait de minute en minute avec de sourds grondements. Autour de nous, dans l’épaisseur du bois, le fracas des torrents se mêlait de plus en plus terrible à la sauvage harmo-