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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/119

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doute que j’adhérais à sa pensée sur le caractère du mystérieux inconnu. Il continua :

– La tentation avait été trop bien conduite pour que fray Epigmenio ne sortit pas vaincu de sa lutte avec le mauvais esprit. Non-seulement le malheureux succomba, mais il fut même si complétement ensorcelé, qu’il trouva moyen de cacher pendant un mois entier, dans le couvent du Desertio, celle qui avait été l’instrument de sa chute. Pendant tout ce mois, sa conduite extérieurement n’avait pas changé ; il affectait même plus de sévérité dans son maintien et les remords qui le tourmentaient secrètement donnaient à ses traits une expression plus sombre. Le ciel et l’enfer se partageaient son âme. Écouta-t-il enfin la voix de l’orgueil plus que celle du repentir ? Le fait est que ses hésitations cessèrent un jour, et ce jour-là il avait pris une résolution inébranlable, terrible. Que voulez-vous ? Fray Épigmenio ne devait rien faire comme les autres. Il avoua publiquement sa faute, et livra au saint-office la femme dont le démon s’était, disait-il, servi contre lui. Il l’accusait de sortilége, de magie : il avait peut-être raison. Dès ce moment, on admira plus que jamais une vertu qui se relevait avec tant d’éclat. L’inquisition instruisit néanmoins le procès du moine comme celui de la séductrice, car le saint tribunal, dans son impartialité, voyait