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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/137

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milieu des soldats avec une merveilleuse nonchalance, adressant de temps à autre à sa victime des reproches que celui-ci, à sa grande surprise, laissait sans réponse. — Allons, voyons, disait-il, pas de mauvaises plaisanteries, Panchito, tu sais bien que je n’ai pas les moyens de payer une pension à ta femme. Tu a beau faire le mort, je ne suis pas ta dupe. — Mais Panchito était bien mort, quoi qu’en dît l’assassin, et je me sentis frissonner, je l’avoue, quand passa tout près de moi ce hideux cadavre dont les yeux gardaient sous les rayons ardents du soleil une effrayante fixité. L’amateur de taureaux était sans doute plus accoutumé que moi à de pareils spectacles, car il alla droit au cortège, l’arrêta, et montrant au meurtrier la lettre de la jeune fille :

— Écoute, lui dit-il, tu n’est pas sans connaître l’illustre Pepito Rechifla ?

– Celui qui doit être étranglé demain ? Parbleu, c’est mon compère.

— Eh bien ! comme tu n’as pas la chance d’être exécuté avant lui, tu vas le voir tout à l’heure à la prison. Tu lui remettras cette lettre de ma part.

— Ah ! seigneur cavalier, — interrompit en ce moment la jeune Mexicaine, qui, la figure baignée de larmes et le sein palpitant, venait de se jeter aux pieds du meurtrier et de saisir à la manière antique un pan de son manteau, — par le sang du Christ et