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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/136

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— Eh bien ne soyez pas en peine. Voici une occasion que le ciel vous envoie.

En ce moment, la foule évacuait les galeries pour se porter tumultueusement sur la Plaza Mayor. Quel était le motif de cette brusque alerte ? Un fait trop commun à Mexico, un assassinat qui venait d’être commis sur la voie publique. On avait saisi le meurtrier, relevé la victime, et le funèbre cortége s’acheminait vers la prison la plus voisine. Cette prison était précisément celle où était renfermé l’amant de la jeune fille, et je compris sans trop de peine le sens des paroles d’espoir qui venaient d’être adressées à la china.

Le cortége qui défilait en ce moment sur la place avait dans son aspect demi-comique, demi-lugubre, une originalité toute locale. Un portefaix marchait en tête, portant sur ses épaules, à l’aide d’une courroie retenue par le front (comme c’est l’habitude des portefaix mexicains), une chaise sur laquelle était attaché un homme ou plutôt un cadavre, enveloppé d’une couverture ensanglantée. L’assassin, placé entre quatre soldats, suivait immédiatement sa victime. Des curieux désœuvrés et quelques amis du mort, grimaçant la douleur tant bien que mal, fermaient la marche. De tous ces hommes plus ou moins émus ou affairés, le plus tranquille, sans contredit, était le meurtrier, qui fumait sa cigarette au