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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/159

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et, derrière ce majestueux entassement de créneaux, de coupoles, de flèches coloriées, la campagne se devinait aux blanches vapeurs qui, s’élevant des lacs vers le ciel, s’amassaient autour de la ville comme pour lui former une lumineuse auréole.

Don Tadeo fut le premier à rompre le silence en m’adressant quelques questions sur l’affaire qu’il s’était chargé de conduire à bonne fin. Je m’empressai de lui répondre en me promettant de l’amener bientôt à me donner sur lui-même quelques révélations qui ne pouvaient manquer d’être curieuses ; mais le licencié était tombé dans une rêverie profonde, et je commençais à désespérer de le tirer de sa réserve, quand le plus étrange hasard vint à mon secours. Ce fut le tintement d’une cloche lointaine qui s’éleva soudain, comme une plainte mystérieuse, au milieu du morne silence de la nuit. À ce bruit, don Tadeo secoua brusquement la tête ; puis il cacha dans ses mains son visage, qui venait de se couvrir d’une mortelle pâleur ; enfin il me prit la main, et m’interrompant au milieu de l’exposé de mon affaire, il s’écria :

– N’entendez-vous pas cette cloche ?

– Oui, vraiment, répondis-je, et, si je ne me trompe ; on sonne en ce moment la prière des agonisants au couvent des Bernardines.

— Au couvent des Bernardines ! répéta le licencié