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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/196

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hache courent dans diverses directions sous une voûte de feuillage presque impénétrable ; à côté de ces sentiers, une végétation luxuriante entrave partout les pas de l’homme, et livre à peine un passage aux bêtes fauves. De longues lianes se tordent, s’entrelacent et étreignent les troncs rapprochés des arbres. Au milieu des lataniers qui inclinent jusqu’à terre leurs palmes gigantesques et luisantes, le cocotier couvre de ses larges éventails son collier de fruits verts ; l’arbre à soie laisse échapper les flocons blancs de ses gousses entr’ouvertes. À l’ombre de ce feuillage touffu, les arums étalent leurs coupes vernies, et au-dessus comme au-dessous de ce dôme de verdure, les gobéas suspendent les guirlandes multicolores de leurs campanules. Tel est l’aspect de ces bois, aspect qui varie toutefois aux diverses phases du jour. À l’heure de midi, cette végétation puissante se courbe sous les feux du soleil, depuis la cime orgueilleuse du palmier jusqu’à l’humble mousse qui tapisse le sol. Une brise brûlante pénètre sous les fourrés et semble y arrêter le cours de la vie : les bêtes fauves, les oiseaux, les insectes, les plantes, tout se tait, tout dort sous ce souffle enflammé ; mais quand le soleil ne dore plus que la pointe des arbres, quand les vapeurs se dégagent lentement de la terre pour retomber plus tard en rosée, ces forêts silencieuses et leurs hôtes renaissent à la vie.