Aller au contenu

Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sait dans la conque transparente d’un peigne d’écaille que des tresses de cheveux retenaient sur la tête inclinée devant lui. Je compris pourquoi le temps lui paraissait si court. Peut-être le mouvement de compassion que j’éprouvai me sera-t-il compté là haut pour quelque chose, car je me sentis tout triste d’avoir à couper le fil d’un si doux roman.

— Tu l’as donc tué, malheureux ? s’écria le moine.

— Je m’assis dans l’ombre sur le trottoir en face de la maison. J’étais ému, le découragement m’avait pris si bien que je m’endormis à mon poste. Le bruit d’une porte qui s’ouvrait m’arracha à mon assoupissement ; un homme sortit. Je me dis alors qu’une parole devait être sacrée, que ce n’était pas le moment d’écouter ma sensibilité naturelle, et je me levai. Une seconde après, j’étais sur les talons de l’inconnu. Les sons d’un piano se firent entendre presque en même temps derrière la fenêtre qui s’était refermée. On sentait que le bonheur devait doubler l’agilité des doigts qui parcouraient le clavier. — Pauvre femme ! me dis-je, ton amant va mourir et tu chantes ! Je frappai…, l’homme tomba…

Le sensible Perico se tut et soupira.

— Le chagrin m’avait-il troublé la vue ? reprit-il après un court silence. Un rayon de lune éclaira en