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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/25

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ce moment la figure de celui que j’avais frappé. Ce n’était pas mon homme. J’en fus, ma foi, content ; j’avais été payé pour tuer, j’avais tué, et, ma conscience tranquillisée à cet égard, je me mis en devoir de couper une mèche des cheveux de l’inconnu, afin de pouvoir rapporter à celui qui me payait un signe quelconque de l’accomplissement de ma mission. Tous les cheveux se ressemblent, me disais-je. Je me trompai encore ; l’homme que j’avais tué était un Anglais ; il avait les cheveux rouges comme un piment mûr. Le beau cavalier vivait. Alors, dans mon désappointement, je blasphémai le saint nom de Dieu, et c’est ce dont je m’accuse, mon père. »

Perico se frappa la poitrine, tandis que le franciscain lui représentait toute la noirceur de ce dernier crime en passant très-légèrement sur le premier, car la vie d’un homme, d’un Anglais hérétique surtout, est d’un poids bien léger au yeux de la classe la moins éclairée de la nation mexicaine, dont le moine et le lépero m’offraient deux types fort distincts. Fray Serapio termina son exhortation en administrant à la hâte à Perico une absolution quelconque dans un latin digne des comédies de Molière ; puis reprit en bon espagnol :

— Maintenant il ne te reste plus qu’à demander pardon à ce cavalier de l’avoir mis trop fréquemment à contribution, ce qu’il te pardonnera volontiers