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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/263

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empiétaient sur sa propre industrie. On avait recueilli d’abord quelques portions isolées de gréement, puis des barils d’eau-de-vie ou de vin, bientôt suivis de caisses flottantes. À mesure qu’on retirait ces épaves de la mer, on les entassait sur la grève, dans un endroit sec, en attendant que le moment fût venu d’en faire le partage. Je dois dire que Ventura procéda à cette répartition avec une stricte impartialité ; il ne s’adjugea en sus de sa part, comme compensation des dangers qu’il avait courus, qu’un certain nombre de précieuses petites caisses de toile d’Irlande. Le tout étant ainsi réglé à la satisfaction des riverains, ceux-ci emportèrent leur butin avec tant de précipitation, qu’en un instant la grève fut déserte.

Nous pouvions enfin, Ventura, Calros et moi, convenir de l’emploi des dernières heures de la nuit, qui déjà touchait à son milieu. Il fut décidé que, dans une heure au plus tard, nous nous retrouverions au bord de la rivière, à un endroit désigné par le pilote, qui nous quitta pour mettre en sûreté son butin. Calros et moi, nous prîmes, en pressant le pas, le chemin du village. Le Jarocho avait assisté avec une indifférence dédaigneuse au pillage de la cargaison naufragée. Avant de quitter la grève, il jeta un dernier regard sur la mer, qui battait avec une fureur croissante la carcasse dé-