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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/270

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tant plus réel que le flot fait remonter l’eau salée jusqu’ici, et qu’il n’est pas rare que des requins accompagnent le flot.

Cet avertissement me révélait un risque de plus que je ne soupçonnais pas, et, en présence des dangers croissants de cette expédition nocturne, je pensai avec plus d’amertume encore aux heures de sommeil ou de farniente que j’aurais pu passer dans mon hôtel de Vera-Cruz.

Calros ne se fit pas répéter l’avertissement et repris son aviron avec plus d’ardeur. Nous étions arrivés à un endroit où deux berges escarpées et rapprochées l’une de l’autre rétrécissaient singulièrement le lit de la rivière. À quelques pas plus loin, il se resserra tellement que les avirons ne pouvaient plus jouer entre les deux bords, et ce ne fut qu’à l’aide d’un crampon de fer accroché aux lianes que le pilote put faire surmonter au canot la rapidité du courant. Bientôt un plus large espace, au sortir de cet étroit canal, permit aux rameurs de reprendre l’aviron, mais les bords de la rivière, à mesure qu’elle s’élargissait, s’élevaient aussi en proportion. De droite et de gauche, de hauts rochers surplombaient au-dessus de l’eau comme l’arche d’un pont brisée par le sommet. Sous cette voûte, chaque coup d’aviron éveillait un écho. Nous avancions au hasard au milieu d’épaisses ténèbres sans pouvoir