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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/280

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— Êtes-vous sûre de ce que vous dites ? demanda Calros d’une voix altérée.

— Mon ami Julian m’a-t-il jamais trompé ? répondit le pilote. Croyez-moi, ce n’est pas un homme à se payer d’illusions. S’il va jamais à Manantial, c’est parce qu’il ne manquera pas de bonnes raisons pour s’y rendre.

C’en était trop, et Calros ne trouva pas la force de continuer l’entretien qui dès lors ne fut pas repris. Les yeux fixés sur l’eau qui fuyait des deux côtés du canot, le malheureux se penchait sur son aviron avec une énergie fiévreuse. Son corps seul était avec nous ; son âme s’était reportée au bois de Manantial.

Enfin nous arrivâmes au terme de cette navigation, dont tous les instants avaient été si pénibles. La rivière élargie coulait entre deux rives basses et presque à fleur d’eau. Sur l’une d’elles, des champs de cannes à sucre étendaient leurs vagues de verdure jusqu’au pied d’une chaîne de collines qui s’élevaient à une petite distance du rivage.

– Nous sommes arrivés, s’écria le pilote ; c’est ici qu’il faut aborder. Le village est derrière ces collines.

Nous mîmes pied à terre ; le pilote amarra le canot sur le bord et marcha devant nous. Nous eûmes bientôt atteint le village ; tout y était tran-