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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/67

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aux habitants des cloîtres de sortir presque à toute heure, et de prendre, avec une aisance parfaite, leur part des jouissances mondaines. On comprend quel élément pittoresque s’introduit dans la société avec cette foule immense que laissent échapper chaque jour d’innombrables couvents, dont chaque ordre vient tour à tour apporter son type sur la scène, depuis le froc noir du dominicain jusqu’au froc blanc du mercedario.

Si les classes élevées de la société mexicaine ont échappé en partie à l’influence des moines, la classe moyenne les écoute encore avec la même vénération superstitieuse qu’il y a un siècle. La bizarre éloquence des sermonnaires du moyen âge a gardé là un fidèle auditoire. Le prédicateur mexicain ne recule, dans sa fougue, devant aucune métamorphose ; il marie l’emphase au cynisme avec une témérité sans égale : tantôt c’est Dieu qu’il représente se faisant du soleil une monture et de la lune un étrier[1] ; tantôt c’est un récit graveleux auquel il soude avec un imperturbable aplomb une moralité religieuse. Descendu de la chaire ou du confessionnal, ce même homme qui vient de prêcher l’ascétisme va égayer par ses bons mots où par ses chansons

  1. Cabalgando el sol, y estribando la luna. Je n’ai pu traduire qu’en l’affaiblissant ce passage d’un sermon que j’ai entendu prononcer à Mexico.