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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/123

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la troupe petit à petit s’amenait : c’étaient les exécutants tout à l’heure entendus dans la rue, à savoir les clowns musicaux Stebb, noueux, cagneux et anguleux, dévastés par les fards, le plâtre et les grimaces, l’un jouant de l’accordéon, l’autre faisant grincer une pochette ; les jolies duettistes Villempré et Sarah, pareilles à deux jeunes filles du meilleur monde égarées dans cette déjà tumultueuse bousculade ; le Russe Tcherkof, brandebourgs et bottes molles, dompteur de chiens de Sibérie, un bel homme tout en barbe, dégageant une odeur de chenil, de graisse et de viande crue ; Corcorano, le roi du fil de fer, ayant l’air de marcher sur des œufs et de faire, sur le plancher, des prodiges d’acrobatie et d’équilibre pour ne pas s’étaler ; the Runkbar-quatuor, quatre Anglaises, la peau brûlante, petites, sèches et presque décharnées, fillettes mal poussées, créatrices de la « danse du miroir » ; Courlantus, le joyeux troupier, — « l’homme qui aurait fait rire M. Woeste » disait l’affiche, lugubre, l’œil chaviré, le menton hérissé de poils rudes, qui tout de suite se mit à battre une verte dans un coin, en attendant que le buffet fût improvisé et que le Champagne coulât. Il vint encore un nègre siffleur, une naine, dont les mains ratatinées étaient glacées et qui parlait comme une personne vortement enrhubée du zerbeau, puis un Monsieur en habit que