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Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/102

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de la fontaine. D’habitude, je la salue sans descendre du trottoir ; hier, j’ai été l’accoster délibérément au milieu des paniers de légumes. Ça a fait sensation sur le marché : toutes les marchandes avaient l’œil sur nous. Elle riait d’un air amusé, où il y avait un peu de malice : il faut dire que j’avais glissé sur une côte de chou :

— Vous venez au marché aussi, Commandant ? Des chicons et des asperges ?

— Non… je viens vous serrer la main… je vous avais vue de loin, en passant… alors, je m’étais dit, n’est-ce pas : « Je vais serrer la main à Valentine »… Tante Lalie va bien ?… Je crois qu’il va faire joliment chaud l’après-midi…

C’est inouï comme je me sens bête quand elle a son air moqueur : plus de présence d’esprit ; la certitude que je vais dire quelque chose d’énorme et d’idiot…

Je regardais l’eau couler dans la vasque de pierre de la fontaine.

— Rien que de voir ça, ça me donne l’envie de prendre un bain, dis-je.

Elle pouffa :

— Vous n’allez pas vous déshabiller, dites ?

Je cherchai quelque chose à répondre et je ne