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Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/133

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têtes dodelinantes, frappait avec son couteau sur son assiette pour scander ce couplet :

Napoléon, passant par Namur,
Vit un’ gross’ femm’ qui c… contre un mur.
Prenant son grand sabr’, fraîchement remoulu,
Il lui coupa la crotte à ras’ du cul !

Tout le monde, en chœur : « À ras’ du cul ! »

Les hommes répétaient les derniers mots d’une voix ferme et catégorique, comme un garde-champêtre dressant procès-verbal ; les dames le répétaient à leur tour, en y mettant de la grâce et du sourire ; c’étaient des voix futées, des ronds de bras, des mines invitantes, des mains offertes comme si elles saluaient à la fin d’une gavotte :

À ras’ du cul !

Et aussitôt, les gestes faits et la phrase chantée, des cris partaient de tous côtés : « Encore une fois, Constant, encore une fois ! »

Constant, aussi sérieux que s’il servait la pratique, reprenait son couteau, son assiette et sa chanson. Hâtons-nous de dire, à la décharge du sexe montois, que presque toutes ces dames étaient des dames de la campagne.

Les vrais amateurs de bourgogne — et ils étaient légion — s’étaient réfugiés dans le bureau du com-