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Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/49

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affirma d’emblée que mieux vaudrait pour la ville de Mons l’écroulement du clocher de Sainte-Isabeth que ma disparition : car, dit-il, on remplace un clocher tandis qu’on ne remplace pas un commandant des chasseurs éclaireurs qui joint les vertus civiques aux mérites militaires. Il me représenta comme un « citoyen d’élite », né à l’ombre du Château, grandi sous le régime de la Liberté et prêt à la défendre, — zou ! — la Liberté, le sabre à la main, si jamais elle avait besoin de mon bras. Il dit que mon cœur avait toujours battu au rythme de notre vieux carillon et que j’avais toujours su mettre, en vrai Montois-Cayaux, les fumées et l’encens de la gloire en dessous de l’odeur des ayttes de la kermesse de Messines et des andouillettes de chez Robette. Il me peignit à la tête de mon bataillon, communiquant à mes hommes mon amour de la discipline et les entraînant aux parades guerrières. Et, tout à coup, il montra Mons écrasée par la nouvelle (le plus tard possible) de ma mort. On aurait dit qu’on suivait le cercueil, on voyait l’innombrable assistance, on entendait le « portez armes » du bataillon à la levée du corps et le tambour voilé de crêpe des Petits Matelots Montois ; sa voix s’étranglait, n’était plus qu’un chuchotement… on aurait cru qu’il ne pouvait plus