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Page:Gaskell Craik - Trois histoires d amour.djvu/74

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tendant l’orgueil qu’il lui inspirait, le bien qu’elle pensait de lui. Cependant tout le monde dans la maison et dans le village savait bien ce qu’il en était. On ne les voyait guère ensemble, excepté le dimanche. D’année en année on l’avait vue traverser la nef, tenant d’abord son petit garçon par la main, puis suivie par le joyeux écolier. Maintenant elle s’appuyait fièrement sur le bras du jeune homme, et chacun disait hautement que c’était bien le fils de sa mère, passionnément aimé, comme ont fait toutes les femmes depuis que la jeune Ève sourit au petit Caïn en disant : « J’ai acquis un homme par l’Éternel. »

Il arriva ainsi à ses vingt et un ans. Ce jour-là, madame Rochdale, pour la première fois depuis son veuvage, ouvrit sa maison et invita tout le voisinage. La matinée fut consacrée aux pauvres gens ; le soir, il y avait un dîner et un bal.

Je devais l’habiller ; depuis mon enfance j’étais pour elle une espèce de femme de chambre et de modiste amateur. Je dis amateur dans le sens exact du mot, puisque c’était l’affection et le respect profond que j’éprouvais pour elle qui m’avaient donné l’habitude de fréquenter ainsi le château. La tendresse engendre la tendresse ; on a toujours un sentiment de bienveillance pour ceux qu’on a traités avec bonté, et madame Rochdale avait du