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Page:Gaskell Craik - Trois histoires d amour.djvu/90

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pourrai-je pas y aller pour vous ? Pourquoi vous donner cette peine ?

Elle me regarda en face, je sentis que je devenais écarlate.

— Merci, Marthe, je tiens à y aller moi-même.

Je me tus ; mais je compris alors qu’elle savait et qu’elle devinait que je savais ce dont parlait tout le village. Quel pouvait être son motif en agissant ainsi ? Voulait-elle montrer qu’elle ignorait les bruits ? Non, car c’eût été impliquer un mensonge, et madame Rochdale était rigidement, absolument véridique dans ses paroles et ses actions. Ou bien était-ce pour prouver à tous les menteurs et à tous les médisants que la dame du château se faisait conduire en plein jour à la porte où… ? Madame Rochdale m’arracha à mes réflexions en disant tout d’un coup d’une voix ferme et nette :

— C’est un honnête homme, n’est-ce pas, Hine le boulanger ?

— Oui, madame.

— Il a… une fille qui sert dans la boutique.

— Oui, madame.

Elle tira le cordon par une secousse subite, et sortit de la voiture. Deux petites taches rouges brûlaient sur ses joues ; du reste, elle était, comme à l’ordinaire, calme, majestueuse, grave.