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Page:Gautier - Constantinople, Fasquelle, 1899.djvu/249

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LE BEÏRAM.

Seraï-Bournou. Les albatros et les goëlands, un peu effarouchés par ce tumulte prématuré, tournoyaient en poussant de petits cris au-dessus des barques, et semblaient chasser avec leurs ailes les derniers flocons de la brume nocturne promenée par la brise comme des duvets de cygne.

Un grand attroupement de caïques était ameuté à l’échelle du Kiosque-Vert, devant le quai du Sérail, et nous eûmes assez de peine à joindre le bord, des saïs promenaient de superbes chevaux de main attendant leurs maîtres.

Comme nous étions en avance, nous allâmes prendre du café et fumer une pipe au Kiosque-Vert, joli pavillon dans l’ancien style turc, déchu de sa splendeur première et servant aujourd’hui de corps de garde et de lieu d’attente. Il est recouvert à l’extérieur de toiles et de bannes dont la couleur motive le nom qu’il porte ; à l’intérieur, des applications de faïences émaillées de colonnettes, de marbre, des restes de peinture et de dorure, témoignent d’une destination primitive plus élevée.

Le kiosque présentait, ce jour-là, un curieux rassemblement de types divers, européens, asiatiques et turcs, de cawas d’ambassade richement costumés et de soldats revêtus de l’uniforme du Nizam, que leur teint bronzé signalait seul comme musulmans.

Enfin les portes du sérail furent ouvertes, et nous parcourûmes des cours plantées de cyprès, de sycomores et de platanes d’une dimension monstrueuse, bordées de kiosques d’un goût chinois et de constructions à murailles crénelées et à tourelles en relief, rappelant un peu l’architecture féodale anglaise, — un mélange de jardin, de palais et de forteresse, — et nous arrivâmes dans une cour à l’angle de laquelle s’élève l’ancienne église de Saint-Irénée, transformée aujourd’hui en arsenal, et qui contient une petite maison délabrée percée de beaucoup de fenêtres, réservée pour les ambas-