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Page:Gautier - Constantinople, Fasquelle, 1899.djvu/294

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CONSTANTINOPLE.

de pistolets de modèle moderne, arrangés avec une symétrie militaire que ne désavouerait pas notre Musée d’artillerie ; mais cette étincelante décoration, qui charme beaucoup les Turcs, et dont ils sont très-fiers, n’a rien qui étonne un voyageur européen. — Une collection qui offre un bien autre intérêt, c’est celle des armes historiques conservées dans une tribune métamorphosée en galerie, au fond de l’abside.

Là, on nous fit voir le sabre de Mahomet II, une lame droite où court, sur un fond de damas bleuâtre, une inscription arabe en lettres d’or ; un brassard niellé d’or et constellé de deux disques de pierreries, ayant appartenu à Tamerlan ; une épée de fer ébréchée, à poignée en croix, — l’épée de Scanderberg, le héros athlétique. Des vitrines laissent voir les clefs des villes conquises, clefs symboliques, ouvragées comme des bijoux, damasquinées d’or et d’argent.

Sous le vestibule sont entassées les timbales et les marmites des janissaires, — ces marmites qui, en se renversant, faisaient trembler et pâlir le sultan au fond de son harem ; — des faisceaux de vieilles hallebardes, des caisses d’armes, d’anciens canons, des coulevrines de forme singulière, rappellent la stratégie turque avant les réformes de Mahmoud, utiles, sans doute, mais regrettables au point de vue pittoresque.

Les écuries, sur lesquelles je jetai un coup d’œil en passant, n’ont rien de particulier, et ne renfermaient, pour le moment, que des bêtes assez ordinaires, le sultan se faisant suivre par ses montures favorites. — Les Turcs n’ont pas, du reste, comme les Arabes, la folie des chevaux, bien qu’ils les aiment et en possèdent de remarquables.

Voilà à peu près tout ce qu’un étranger peut voir dans le sérail. — Nul regard profane ne souille les asiles mystérieux, les kiosques secrets, les retraites intimes ; — le sérail,