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Page:Gautier - Constantinople, Fasquelle, 1899.djvu/356

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CONSTANTINOPLE.

selles grecques se promènent en se tenant par la main et lancent un coup d’œil curieux à un voyageur européen ; des hommes passent à cheval, des matelots remisent un caïque particulier dans sa cale voûtée ; les figures manquent rarement au paysage.

Les lecteurs de ce livre sont assez familiarisés maintenant avec l’architecture locale pour qu’il ne soit pas nécessaire de leur faire une description des maisons d’Arnaout-Keuï. Je noterai cependant comme particulières de vieilles habitations arméniennes peintes en noir, ce qui était autrefois la couleur obligée, les teintes claires appartenant de droit aux Turcs, et le rouge sang de bœuf ou rouge antique aux Grecs ; aujourd’hui chacun peut peindre sa maison comme il veut, excepté en vert, la couleur de l’Islam, des hadjis et des descendants du prophète.

Sur la côte d’Asie, plus boisée et plus ombreuse que celle d’Europe, les villages, les palais et les kiosques se succèdent, un peu moins serrés peut-être mais à des distances très-rapprochées encore. C’est Kous-Goundjouk, Stavros, Beylerbey, où Mahmoud se fit bâtir une résidence d’été, Tchengel-Keuï, Vani-Keuï, et en face de Babec les Eaux-Douces d’Asie (Guyuck-Sou).

Une charmante fontaine en marbre blanc, toute brodée d’arabesques, toute historiée d’inscriptions en lettres d’or, coiffée d’un grand toit à forte projection et de petits dômes surmontés de croissants, qui s’aperçoit de la mer et se détache sur un fond d’opulente verdure, désigne au voyageur cette promenade favorite des osmanlis. — Une vaste pelouse, veloutée d’un frais gazon, encadrée de frênes, de platanes et de sycomores, s’encombre, le vendredi, d’arabas et de talikas, et voit s’étendre sur des tapis de Smyrne les beautés paresseuses du harem.

Les nègres eunuques, fouettant leurs pantalons blancs du