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Page:Gautier - Fusains et eaux-fortes.djvu/262

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À PROPOS DE BALLONS.

navire, le bateau à vapeur, la cloche à plongeur lui ouvrent le domaine des eaux. Restait celui de l’air, où l’oiseau nous échappait, poursuivi seulement à quelques centaines de pieds par la flèche et le fusil, moyens ingénieux de rapprocher les distances. Il semble vraiment que Dieu aurait bien pu nous donner des ailes comme les peintres en prêtent aux anges ; mais l’homme, c’est là ce qui fait sa beauté et sa grandeur, ne doit pas posséder ces appendices gênants, pas plus qu’il ne doit être embarrassé de nageoires. Avec la pensée et la main, cet admirable outil, il faut qu’il trouve hors de lui toutes ces puissances.

L’idée de s’élever dans les airs n’est pas nouvelle ; ce n’est pas d’aujourd’hui que Phaéthon a demandé à monter dans le char de Phœbus, et que Dédale a lancé du haut d’une tour son fils Icare. Leurs chutes sont des ascensions manquées. Ils sont les Pilastres de Rozier de l’époque fabuleuse. La chute d’Icare semble même être la suite d’une explosion venant de la trop grande dilatation du gaz aux rayons du soleil, ce que la mythologie explique par la fonte à la chaleur de la cire qui retenait les plumes de ses ailes. Le char de feu qui emporte Élie au ciel a bien la mine d’un ballon réussi, et les aigles qui enlèvent Ésope pour bâtir en l’air le palais du roi Nectanébo ne sont pas si chimériques que l’on pense. Les griffons, les hippogriffes, les pégases, les talonnières, la