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Page:Gautier - La Chanson de Roland - 1.djvu/110

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INTRODUCTION

remanieur a conservé l’antique rédaction, et qu’un autre l’a remplacée par une version nouvelle[1]. Mais telle n’est point encore la plus grande utilité de nos remaniements.

Notre texte d’Oxford est médiocre. On y surprend à tout instant le scribe en flagrant délit de négligence et d’oubli. Il a omis des vers et même des couplets entiers. Comment retrouver ces vers et ces laisses oubliés ? Comment combler ces lacunes ?

C’est ici que les rajeunisseurs se présentent à nous, leurs manuscrits à la main, en nous disant : Tolle, lege. Les lacunes, toutes les lacunes du texte d’Oxford sont comblées par nos refazimenti[2], et il est possible de reconstruire avec eux le texte primitif dans toute son intégrité. Sans doute, il y faudra des soins délicats ; sans doute, il sera nécessaire de ramener ces textes au dialecte original. Mais enfin la chose est possible, et nous l’avons entreprise. Nous avons restitué tous les vers, tous les

    couplets cciv et ccv du même remaniement. L’un est la laisse antique scrupuleusement conservée ; l’autre est le rajeunissement de cet ancien couplet. A. Couplet antique : Dient Paien : « L’Emperere repaire ; — De ceuls de France poez oïr les graisles. — Se Karles vient, duel i auronz et perde. — Se Rollans vit, nostre guerre est nouvelle. — Perdue avons Espaingne, la grant terre. » — Lors se rassemblent la pute gent adverse, — III. C des mieudres qui el champ porent iestre. — A Rollant font I assaut fort et pesme. — Il se defant com chevaliers honestes — Et lor decope et les bras et les testes. (Paris, laisse ccv.) ═ B. Couplet nouveau. Quant Paien oient le son des olyfans, — Dist l’uns à l’autre : « Karles est repairans. — De ceuls de France oiez les cors sonnans. — Se Rollans vient, nostre painne est moult grans. — Perdu avons d’Espagne touz les pans. » — Plus de C. M. de tous les miex vaillans — Sont assamblé as vers elmes luisans. — Molt fièrement fu assaillis Rollans. — Or a li Cuens endroit lui grans ahans. — Cil le regart qui sur touz est puissans ! — A Durandart, dont li brans est tranchans, — A fait tel place des cuivers mescreans, — Que les javelles en gisent par les champs (Paris, laisse cciv). Dans notre note du v. 2,115 nous avons comparé au premier de ces deux couplets le texte de Venise VII : l’auteur de ce dernier remaniement n’a pas conservé le couplet antique à côté de la laisse rajeunie ; mais il l’a remanié autrement, et sur une rime en aire.

  1. Lire, dans la note précédente, les couplets cciv et ccv du texte de Paris, et les comparer au texte de Venise que nous avons donné dans notre note du v. 2,115.
  2. V. nos Notes et variantes où nous avons tenté d’utiliser tous les textes remaniés au profit de notre texte antique.