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Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/280

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vons, malgré l’axiome, que c’est le chemin le plus long pour aller d’un point à un autre, puisque c’est le plus ennuyeux. Beaucoup de maisons neuves se sont élevées, plus confortables sans doute que les anciennes, mais, à coup sûr, moins caractéristiques. Elles présentent un aspect uniforme et plat, idéal de l’architecture moderne. Tous les civilisés militaires en seront satisfaits, et nous convenons que la plupart d’entre elles tiendraient fort bien leur rang dans les plus belles rues de Paris. Cette confession faite (et elle nous coûte), on nous permettra de regretter l’ancienne physionomie de la puerta del Sol. La façade d’église qui formait le fond de la place, entre les rues d’Alcala et de San-Geronimo, a disparu. Un grand hôtel, dans le genre de l’hôtel du Louvre, s’est substitué au portail de style jésuite, orné de volutes contournées et d’un cadran à rayons d’or figurant un soleil. D’élégants magasins se sont ouverts avec devantures de glaces et étalages à la parisienne ; une fontaine à vasque classique marque le centre de la place. Ce sont de ces choses dont une ville est fière. Mais nous n’avons pas retrouvé ces longues files de graves personnages qui, embossés dans leur manteau et ne laissant sortir que leur cigarette entre le pouce et l’index, se tenaient immobiles pendant des heures, oc-