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Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/329

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facturière, industrielle, commerçante. La vie abonde dans ses rues autrefois si désertes, et le marché de grains des deux Castilles s’y rencontre. Nous ne vîmes pas non plus les deux beaux ponts elliptiques qui traversent le Duero et l’Adaja, qu’on rencontre avant d’arriver à Valladolid lorsqu’on vient de Madrid. Les voyages, de quelque façon qu’on les arrange, ont toujours des heures noires, et il se trouve des maculatures indéchiffrables aux pages les plus intéressantes. Ne pouvant pas tout voir, on doit se contenter de voir quelque chose. La vie humaine est faite d’incomplet.

Mes compagnons ne connaissaient pas Burgos. Le train y arrivait de grand matin, et, en sacrifiant le déjeuner, on avait le temps, jusqu’à l’arrivée du second convoi, de jeter à la hâte un coup d’œil sur la cathédrale. La gare du ferro carril est sur la rive de l’Arlanzon, et nous entrâmes dans la ville par cette belle porte de Sainte-Marie, élevée en l’honneur de Charles-Quint, où se cambrent des statues d’une fière tournure dans le goût espagnol-flamand. Burgos n’a plus cet air de grandesse délabrée et de misère héroïque qui le caractérisait autrefois. S’il garde sa fierté castillane, il a remplacé par un bon manteau presque neuf cette cape en dents de scie, ayant la couleur et la consistance de l’a-