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Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/338

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faite en cas d’attaque. Sans doute, les brigands privés de leur industrie se sont faits terrassiers ou cantonniers, et, la main sur le cœur, le bras étendu, indiquent que la route est libre. C’est plus moral sans doute, mais moins pittoresque, du moins dans le sens où nous entendions autrefois le pittoresque.

À Miranda, l’on traverse le Zadorra et l’Ebre, et l’on poursuit jusqu’à Vitoria sans s’éloigner de l’ancienne route de terre. Mais, arrivé à ce point, le chemin de fer fait un coude et se dirige vers Alsagua, et, se retournant vers l’ouest, gagne Villafranca et s’engage résolument dans la montagne, qu’il surmonte à force de remblais, de tranchées, de tunnels, de viaducs et de travaux d’art. À chaque instant, des perspectives subites, visions éblouissantes, s’ouvrent entre deux escarpements ; de fraîches vallées se creusent en abîmes de verdure, des villages apparaissent et disparaissent en un clin d’œil avec leurs clochers. Aux stations, des chariots à bœufs, dont les roues sont pleines comme celles des chariots homériques, attendent les paquets du chemin de fer et font contraster tout naturellement la barbarie primitive avec le dernier mot de la locomobilité. Voilà, nous l’espérons, un vocable agréable et tout à fait moderne ! Après avoir longé Tolosa, Er-