Aller au contenu

Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/209

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
201
ESCAL-VIGOR

ration de leurs sympathies. Ainsi, au pensionnat, j’aimai, en désespéré, William Percy, un jeune lord anglais, celui-là même qui avait failli me noyer, sans jamais oser lui témoigner que par une ferveur fraternelle l’ardeur dont je me consumais pour lui[1].

Au sortir de Bodenberg Schloss, quand je te rencontrai, Blandine, je crus rentrer, par mon amour pour toi, dans l’ordre commun. Mais, malheureusement pour tous deux, cette rencontre ne fut qu’un accident dans ma vie sexuelle. Malgré des efforts loyaux et héroïques, une tyrannique concentration de volonté pour les fixer sur la meilleure et la plus désirable des femmes, mes postulations charnelles se détournèrent bientôt de toi et je ne t’aimai plus que de toute mon âme, ô Blandine ! À cette époque, des restes de scrupules chrétiens, ou plutôt bibliques, me dégoûtaient de moi-même. Je me faisais horreur et me croyais véritablement maudit, possédé, désigné aux feux de Sodome !

Puis, l’injustice, l’iniquité de mon destin me réconcilia, sourdement, avec moi-même. J’en arrivai à n’accepter en mon for intérieur que le témoi-

  1. Voir, dans Mes Communions : Climatérie.